La pittura è cosa mentale !
Denis me demande pourquoi avoir choisi l’expression « La pittura è cosa mentale ».
En fait, à partir du moment ou l’on décide de faire un tableau, d’innombrables questions se posent à tous les stades de l'élaboration, des questions techniques bien sûr, mais pas que !
D’abord, quoi peindre ? On va répondre instinctivement, bé quelque chose d'intéressant, de beau tant qu'à faire, sauf que tout est beau, ça dépend de comment on regarde ; «Pour qu'une chose soit intéressante, il suffit de la regarder longtemps » (Gustave Flaubert).
Donc retour à l’envoyeur, qu’est-ce qu’on peint ?
Un très beau bouquet de fleurs, un paysage pittoresque, quelque chose de remarquable… Alors là, attention danger, parce qu’au final, on ne voit que le bouquet, le beau paysage mais plus la peinture, ou l’« être pictural » (un peu pompeux mais je n’ai pas trouvé mieux).
Pareil pour la technique employée : l’aquarelle par exemple ; très fortement connotée. Je me trompe peut-être, mais elle sous-entend peinture délicate, féminine, plutôt de petit format… bien sûr, on oublie Turner et Paul Klee.
Les autres techniques (huile, pastel…) sont tout aussi connotées et promptes à nous faire aussi oublier le tableau, ou si on veut les « idées » qui sous-tendent le dit tableau !
Ensuite le format, c’est important le format, tellement important que c’est une bonne raison, peut-être la seule en définitive, pour aller au musée se rendre compte. Perso, j’ai toujours trouvé qu’il est beaucoup plus facile d’étudier un tableau avec une bonne reproduction chez soi dans son fauteuil… mais il y a le format, donc, malgré tout, en route pour le musée avec la horde !
Autre petite remarque concernant le format qui n’améliore pas et même qui fausse sa juste contemplation : beaucoup de tableaux sont reproduits en posters souvent en plus petit mais quelques fois en plus grand. Certaines aquarelles de Paul Klee sont reproduites en beaucoup plus grand pour faire de jolis posters décoratifs… en perdant toute la poésie des dites aquarelles !
Et donc quel format choisir ? un format carré, neutre, un format à l'italienne qui met en valeur les horizontales ou un format à la française qui privilégie les verticales ? le choix influence la signification même du tableau ! Pour ceux que ces questions intéressent, je renvoie au livre de Kandinsky « Point, ligne, plan : pour une grammaire des formes ».
Choisir le format, c'est aussi choisir le cadrage, mais en choisissant le cadrage, on privilégie certains éléments pour en éliminer d'autres. Le problème c'est que ces autres éléments « influencent » la scène choisie. Donc la question est : comment les réintégrer dans la scène sans qu'ils soient présents. Cézanne, je trouve, a particulièrement réussi cela! Quand Cézanne peint la montagne Sainte-Victoire, il s'en fout un peu de la Sainte-Victoire; pour lui c'est juste un point d'appui pour exprimer la Provence, le Tout de la Provence avec ses couleurs, son atmosphère, son air... Maurice Merleau-Ponty explique bien cela dans son article « Le doute de Cézanne »...
À suivre… ou pas !




